Piroplasmoses

La piroplasmose est une maladie parasitaire transmise par une tique porteuse d'un protozoaire. Il est parfois difficile de suspecter la maladie car la majorité des chevaux et des ânes contaminés ne manifestent pas de signes cliniques évocateurs. Ce n’est pas une maladie contagieuse et cette forme « équine ou asine » n’est pas transmissible à l’homme.

Causes de la maladie

La piroplasmose est due à l’infection du cheval par deux protozoaires parasites, Theileria equi ou Babesia caballi.

Il faut un vecteur pour transmettre les parasites, une tique.

Figure 1 : tique récoltée

La transmission s’effectue par l’intermédiaire de 3 genres de tiques dures : Dermacentor, Rhipicephalus et Hyalomma. Celles-ci s’infestent généralement en ingérant le sang d’un cheval porteur de protozoaires (ou parasites), puis transmettent la maladie à un autre animal par l’intermédiaire de leur salive, lors de la piqure et de leur repas sanguin.

Ces acariens sont actifs toute l’année. On les trouve principalement en lisière de forêts, mais aussi dans les prairies non fauchées et terrains vagues, voire les jardins.

Figure 2 : Cycle de développement de la piroplamose

Transmission

Le cheval peut être contaminé (ce n’est pas systématique), lors de la piqure par une tique porteuse de la babésia, au pré, en promenade… Lorsque cette tique est repue, elle tombe, mue et le stade suivant cherche un nouvel hôte.

A l’exception d’un possible passage transplacentaire, le risque de transmission du parasite est inexistant en l’absence de tique vectrice. La piroplasmose n’est pas une maladie contagieuse car elle ne peut pas se transmettre directement d’un cheval contaminé à un autre sain.

Chevaux dans un pré
Figure 3 : Pas de transmission directe entre chevaux. © C. Soler

L’homme peut également être « vecteur de propagation » lors d’injections intraveineuses, de transfusion sanguine ou de prélèvement sanguin sur les chevaux, s’il n’utilise pas de seringues et d’aiguilles à usage unique. Il peut y avoir alors contamination d’un animal contaminé à un animal sain par ce biais.

Répartition géographique

Elle est présente sur l’ensemble du territoire français. La moitié sud du pays semble plus touchée mais du fait du réchauffement climatique, son aire de répartition s’étend dans des départements du nord de la France.

Mécanisme pathologique

Les deux protozoaires, Theileria equi ou Babesia caballi, envahissent les hématies (globules rouges) du cheval, s’y multiplient et finissent par les faire éclater, libérant l’hémoglobine contenue.

Symptômes

Les signes cliniques sont peu spécifiques. La maladie peut être mortelle ou engendrer de graves séquelles.

  • Dans la phase aiguë, potentiellement mortelle, la maladie est suspectée par 3 éléments successifs :
    – l’anémie (diminution du nombre d’hématies du fait de leur éclatement),
    – la forte hyperthermie (> à 40°),
    – l’ictère (jaunisse) et une hémoglobinurie (présence de l’hémoglobine des hématies lysées dans les urines).

La confirmation de la présence de piroplasmes doit être réalisée en laboratoire.

  • La phase chronique latente (signes cliniques moins évocateurs ou fluctuants) peut s’installer d’emblée et pourra être décelée par la mise en évidence des anticorps spécifiques dans le sérum du cheval, par la réalisation d’une PCR ou d’un frottis sanguin.

Les signes cliniques diffèrent selon qu’il s’agit d’une infection à B. caballi ou T. equi. :

  • Babésia caballi:
    – Forte hyperthermie avec pic supérieur à 40° pendant 24 à 36 heures,
    – Baisse de l’état général, perte d’appétit,
    – Syndrome hémolytique : muqueuses pâles ou ictériques (jaunes), anémie, hémoglobinurie,
    – Œdème des membres,
    – Complications rénales, cardiaques à craindre,
    – Parfois, coliques, symptômes nerveux,
    – Installation d’une forme chronique avec une grande fatigabilité à l’effort et une anémie chronique modérée.
  • Theileria équi (forme la plus grave) :
    – Fièvre, anémie, ictère (moins intenses qu’avec caballi),
    – Évolution plus longue aboutissant à terme à un ictère important et à une anémie plus marquée,
    – Mort possible dans les 24 à 48 heures,
    Forme latente : En phase latente, les parasites sont présents en faible quantité dans la circulation sanguine générale. Ils se localisent souvent dans les organes hématopoïétiques (foie, rate, moelle osseuse). Lors d’une baisse des défenses immunitaires (stress, maladies…) du cheval, le parasite peut réapparaître dans la circulation sanguine générale.

NB : La vraie forme latente est uniquement due à Theileria ; avec Babesia on a des formes frustes avec des symptômes atténués, mais la forme latente, donc les ressorties de piroplasmes, ne sont connues que pour Theileria.

Diagnostic

Le diagnostic peut se faire par :

  • La recherche directe du parasite ou de son génome :
    – Technique PCR, très sensible,
    – A partir d’un frottis sanguin, depuis du sang périphérique, permettant de mettre en évidence les piroplasmes dans les hématies. On peut aussi rechercher les parasites par des techniques PCR considérées comme plus sensibles.
  • La recherche d’anticorps :
    – par la méthode de fixation du complément (RFC, considérée comme le test sérologique officiel de dépistage des piroplasmoses dans le cadre de l’exportation),
    – par l’immunofluorescence indirecte (IFI),
    – par des techniques ELISA pour la mise en évidence des anticorps spécifiques que le cheval a développés.

Aucune de ces différentes techniques de dépistage n’est infaillible car chacune détecte des éléments différents à des étapes différentes, ce qui les rend complémentaires ; pour un dépistage efficace, il est conseillé d’utiliser plusieurs techniques, notamment en cas d’exportation…

Dans le cadre du diagnostic d’une forme aigüe, la sérologie peut être utilisée à condition de réaliser une cinétique d’anticorps (deux tests à deux semaines d’intervalle).

Traitement & prévention

Traitement

Seul votre vétérinaire est compétent pour poser un diagnostic et établir le traitement adapté. Sur les formes aiguës, il faut agir rapidement dès l’apparition de la maladie, car la mort peut survenir en 24 à 48 heures.

Certains chevaux guérissent sans traitement mais restent porteurs latents. Il arrive d’ailleurs que la sérologie devienne négative au bout de quelques mois.

Les injections d’imidocarb en intra-musculaire (Carbesia® par exemple) constituent un traitement efficace des piroplasmoses ; elles restent cependant délicates de par la tolérance aux doses nécessaires pour traiter la théilériose, avec des effets secondaires (coliques, diarrhée, myosis, décubitus prolongé). Ce produit ne dispose pas d’AMM pour le cheval.

Parallèlement, un traitement symptomatique peut être prescrit, (diurétiques par exemple lors d’œdèmes déclives).

En revanche, ce traitement ne permet pas toujours d’éliminer Theileria equi. La guérison clinique est possible, mais les équidés restent très souvent porteurs du parasite et risquent des rechutes cliniques.

Le traitement des ânes doit être réalisé avec des doses adaptées car cette espèce est particulièrement sensible à la molécule utilisée.

Prévention sanitaire


Figure 4 : Tiques sous l’encolure et dans l’auge d’un cheval

Compte tenu du cycle de vie du vecteur de transmission les mesures de précaution doivent s’appliquer tout au long de l’année pour limiter le risque de piqures :

– en traitant les pâtures afin d’éliminer les habitats propices à la survie des tiques, limiter l’accès aux zones boisées, débroussailler en bordure de pâtures ;

– en observant attentivement les chevaux lors du pansage, au retour de promenade, etc. en particulier pendant les périodes les plus à risque et en retirant systématiquement les tiques s’il y en a

En effet, la transmission des protozoaires au cheval n’arrive que quelques jours après que la tique se soit attachée sur la peau puisqu’une phase de maturation du piroplasme est nécessaire. Il est alors conseillé de retirer les tiques au plus vite, dès qu’elles sont visibles. Les tiques affectionnent les zones de peau fine (nez, tête, ars, queue, pli du grasset). Pour les retirer, ôter la tique avec une pince spécifique afin que son rostre se détache aisément, car la tête est sous la peau du cheval. Désinfecter la zone de piqure avec un antiseptique.

– des acaricides ou des répulsifs peuvent être utilisés contre les tiques, mais leur efficacité reste limitée.

Figure 5 : pince à tiques

NB, idée reçue : Lorsque l’on enlève une tique sans arracher sa tête, il en repousse une autre, à partir de cette tête. C’est faux, l’acarien est mort, mais c’est un kyste qui peut se former autour de ce corps étranger.

Prévention médicale

Il n’existe pas de vaccin équin sur le marché.

Réglementation

ECHANGES COMMERCIAUX

Les chevaux infectés latents représentent un risque épidémiologique, qui peut se révéler à la faveur d’un stress par exemple, et être transmis à des chevaux sains si un vecteur de transmission (la tique) est présent dans l’environnement.

C’est pourquoi, certains pays exigent que les animaux importés soient indemnes de piroplasmoses latentes. Par exemple, les États-Unis, le Canada, le Japon exigent la négativité sérologique des animaux importés.

Bibliographie

Chapitre 2.5.8 : Piroplasmoses équines. Manuel terrestre de l’OIE (2008). In : Document en ligne, OIE, [http://www.oie.int/fr/normes-internationales/manuel-terrestre/acces-en-ligne/] (Consulté le 10 mai 2013)

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