Etiologie des avortements recensés à l’Afssa Dozulé (LERPE) – Bilan septembre 2000 – mai 2001 – bulletin n°6
La maîtrise des paramètres de la reproduction est primordiale pour la rentabilité d’un élevage équin. En effet, encore plus que pour d’autres espèces, les conséquences d’un avortement tardif sont souvent très pénalisantes, c’est également pouvoir s’en prémunir de façon plus efficace.
Sur la campagne étudiée, 65 produits d’avortements ont été autopsiés à l’AFSSA Dozulé. Les analyses complémentaires ont été réalisées conjointement par le laboratoire Frank Duncombe et l’AFSSA. Les foetus proviennent pour l’essentiel des départements du Calvados (44%) et l’Orne (43%).
On constate que 70% des avortements se situent entre 6 et 9 mois, 20% entre 9 et 11 mois.
La moyenne d’âge des juments concernées est de 11 ans (70% des juments ont entre 6 et 15 ans). Notre population est constituée à 46% de pur-sangs, 42% de trotteurs et 12% d’autres races. Il faut noter ici une forte sur-représentation du groupe des pur-sang qui constitue environ 14% de la population totale des naissances équines dans les départements du Calvados et de la Manche et une sous-représentation des autres races (en particulier de la race selle français).
Les agents infectieux associés
Les avortements d’origine bactérienne : la majorité des avortement recensés ont une étiologie bactérienne (58,7%). Ce chiffre est plus élevé que les années précédentes où il oscillait entre 30 et 40 %. Les principaux agents incriminés sont Str. zooepidemicus et Str. equisimilis (13/40), St. aureus(6/40), Aeromonas hydrophila (5/40), Klebsiella pneumoniae (4/40) et E. coli (3/40). Lorsque l’avortement est associé à une placentite, Str. zooepidemicus est isolé dans 70% des cas. En ce qui concerne la leptospirose, des résultats positifs ont été obtenus par PCR sur les organes de ces foetus (7 sites prélevés et adressés au LDFD). La relation entre ces résultats positifs et l’anatomo-pathologie est en cours d’étude.
Les avortements d’origine virale : 4 juments ayant avorté étaient en phase de développement d’une affection à EHV1 (rhinopneumonie). Les foetus étaient respectivement âgés de 6 ; 9,5 ; 10 et 10,5 mois de gestation. Cela représente 6% des avortements ce qui est un peu en deçà des chiffres enregistrés les années précédentes (se situant plutôt aux alentours de 10%). Deux mortinatalités liées à une infection à EHV1 (non comptabilisées dans les avortements) ont également été enregistrées à l’Institut sur la même période. Les 6 juments concernées n’avaient pas été vaccinées préventivement contre la rhinopneumonie.
Aucun avortement n’a pu être associé à une contamination par le virus de l’artérite virale.
Les avortements d’origine mycosique : un seul avortement d’origine fongique a été identifié. Le champignon isolé était Aspergillus fumigatus. comme le souligne la littérature, ils semblent assez peu fréquents.
Etiologies non infectieuses
Les gestations gémellaires : elles sont rarement en cause dans notre population (1 seul cas enregistré) bien qu’elles soient considérées comme la cause la plus commune des avortements d’origine non infectieuse. Ceci s’explique par la qualité du suivi gynécologique du cheptel de jument qui constitue la clientèle de l’Institut et du faible nombre de gestations gémellaires non interrompues précocement.
Anomalies du cordon : la torsion du cordon qui engendre une insuffisance vasculaire semble être impliquée dans 18,4% des avortements. Il semble qu’une longueur excessive du cordon qui prédispose à ces phénomènes de torsion puisse être favorisée par des facteurs génétiques (sexe du poulain, effet étalon) et un effet « âge de la jument » (risque accru avec l’augmentation de la parité de la jument). Nous n’avons pas identifié dans notre population d’effet de race.
Comment prévenir ces avortements ?
Avortements d’origine bactérienne : la contamination du placenta et/ou du foetus peut s’effectuer de deux façons : par voie ascendante (donnant des placentites localisées ou étendues) ou par voie hématogène (aboutissant à une septicémie foetale).
En ce qui concerne la première voie, elle serait favorisée par une incompétence cervicale (relâchement du col de l’utérus), par des déformations de la vulve liées à des gestations multiples ou par la présence de cicatrices sur le col de l’utérus. Le prévention passe par un hygiène rigoureuse de locaux d’élevage et une surveillance étroite, chez les juments à risque, des signes précurseurs de placentite : écoulement purulent au niveau de la vulve, développement prématuré de la mamelle, relâchement des ligaments pelviens. En ce qui concerne la voie hématogène, la seule mesure de prévention est d’éviter que la jument n’entre en contact avec les agents infectieux incriminés (prophylaxie sanitaire essentiellement).
Avortements d’origine virale : on ne peut que rappeler l’importance d’effectuer régulièrement la vaccination des juments contre le virus EHV1. Encore trop d’élevages sous estiment l’importance d’une vaccination réalisée en temps et en heure et sur la totalité de l’effectif (juments gestantes, vides et chevaux à l’entraînement s’ils cohabitent sur le même site).
Que faire en cas d’avortement ?
– Déclaration au RESPE
– Réalisation systématique d’une autopsie (par le laboratoire vétérinaire le plus proche ou le vétérinaire praticien). Des prélèvements stériles de poumon, foie et rein peuvent alors être adressés sous conditionnement réfrigéré aux laboratoires compétents pour la recherche des principaux agents infectieux incriminés
– Des analyses peuvent être également réalisées à partir du sang de la mère :
1/ rhinopneumonie : recherche d’anticorps par séroneutralisation (précoce) ou fixation du complément (tardif). En cas de suspicion d’avortement lié à la rhinopneumonie ou à la leptospirose, du plasma de la jument peut être également adressé au laboratoire.
2/ leptospirose : recherche d’anticorps dans le sang ou recherche directe de traces de leptospires par PCR (sang, urine)