La gourme chez le cheval – Bilan 2006/2007 : enseignements et… mea culpa ! – bulletin n°23

François VALON (1)

Depuis 2006, les vétérinaires sentinelles du RESPE bénéficient d’une aide complémentaire pour le diagnostic des affections respiratoires chez le cheval, le sous réseau spécialisé Gourme complétant le sous réseau spécialisé Syndrome Respiratoire Aigu (ou Syndrome Grippal).

Ce réseau créé à l’initiative de la commission Maladie Infectieuse de l’AVEF et validé par le Conseil d’Orientation du RESPE a pour objectif d’évaluer l’incidence et la prévalence de la gourme dans sa forme aiguë en France et de décrire, dans les foyers, son épidémiologie clinique. En effet, le développement de vaccins gourme et particulièrement « Equilis StrepE » par le laboratoire Intervet, imposait de reconsidérer avec objectivité l’importance de cette affection et les méthodes de lutte.

Il était convenu à l’issu de la première année de fonctionnement d’analyser les résultats obtenus dans le cadre du RESPE (Etude de faisabilité). Ce travail a fait l’objet d’une thèse vétérinaire (*) soutenue à l’ENV de Lyon par Roxane Cazin  et Chloé Roques sous la direction du Professeur Jean-Luc Cadoré.

A partir de cette première année de fonctionnement et de cette étude, il a été possible de dégager un certain nombre d’enseignements :

– entre le 15 Mai 2006 et le 15 Mai 2007 sur 53 foyers déclarés, 19 foyers (37%) ont été identifiés positifs pour la Gourme.

– Du point de vue du laboratoire :

La totalité des analyses ont été effectuées par le Laboratoire départemental Frank Duncombe (Calvados).

Actuellement, la technique de référence pour le diagnostic de la gourme est l’analyse bactériologique.

Cependant dans le cadre du réseau, une analyse parallèle par technique PCR (Détection de la séquence d’ADN du gène de la protéine SeM de S. equi subsp. equi) directement sur écouvillon a été entreprise. Les résultats obtenus montrent que la technique PCR a une spécificité identique à la bactériologie et une sensibilité supérieure (Tableau 1). Parmi les 25 chevaux déclarés atteints de gourme, tous avaient un résultat PCR et bactériologique positifs, sauf 1 qui présentait un résultat positif en PCR et négatif en bactériologie.

Rappelons par ailleurs que la technique PCR est la méthode de choix pour l’identification des formes chroniques de gourme et des porteurs asymptomatiques.

– Du point de vue des épidémiologistes :

La population équine la plus touchée est représentée par les PONEYS (48%).

Ils représentent une source de contamination et particulièrement pour les chevaux de selle et de sport dans les centres équestres où les différentes populations cohabitent (Figure 1a).

Contrairement aux données de la littérature, les animaux affectés, toutes races confondues, ne sont pas significativement plus jeunes que la population témoin (Figure 1b).

Figure 1a : Répartition des types d’activité chez les animaux positifs pour la gourme dans le sous réseau gourme du RESPE
Figure 1b : Répartition de l’âge des animaux positifs pour la gourme dans le sous réseau gourme du RESPE

Il n’est pas noté une plus grande fréquence de foyers pendant la période hivernale contrairement à ce qui est habituellement décrit (Figure 2).

– Du point de vue du praticien :

Avant la mise en place de ce réseau :

A la question : « la Gourme vous connaissez ? », ma réponse était : « bien sûr ! »

A la question : « des analyses sont-elles utiles pour son diagnostic ? », ma réponse était : « non, sans nul doute, la symptomatologie étant généralement trop évocatrice pour y recourir. »

Environ 50 pour cent des confrères interrogés lors du Congrès AVEF 2007 partageaient ces points de vue.

Après la mise en place de ce réseau :

L’analyse des données et le vécu de vétérinaire sentinelle infirment cette assertion.

Ainsi, seulement 37 % de foyers déclarés correspondent à des foyers de Gourme vraie (infection par Streptococcus equi subsp. equi).

De plus, si l’étude des caractéristiques cliniques des foyers confirment une symptomatologie compatible avec cette affection (Affection respiratoire contagieuse avec forte hyperthermie), le jetage purulent et les adénites sévères ou abcèdatives ne représentent qu’environ 40 % des cas positifs déclarés.(Figure 3a et 3b).

Figure 3a : Aspect du jetage nasal observé chez les chevaux positifs du sous réseau gourme du RESPE

Figure 3b : Degré de sévérité de l’adénopathie observée chez les chevaux positifs du sous réseau gourme du RESPE

Dans ces conditions, le diagnostic différentiel entre la gourme dans sa forme aiguë, les autres affections respiratoires bactériennes et le SRA doit être réalisé. Le recours aux examens complémentaires de laboratoire s’impose alors le plus souvent.

En conclusion, le développement de sous réseaux spécialisés et la prise en charge des analyses par le RESPE permettent de confronter la démarche scientifique à la pratique empirique et d’en révéler les limites et les dangers. Il y va de la crédibilité du praticien en charge de la mise en place des prophylaxies sanitaires et médicales.

Enfin, les informations épidémiologiques et cliniques de cette étude préliminaire méritent d’être validées et complétées par le recrutement de nouveaux cas plus nombreux et parfaitement renseignés.

BIBLIOGRAPHIE :

(*) « La gourme du cheval : étude bibliographique et épidémiologique en France »

« Streptococcus equi Infections in Horses : Guidelines for Treatment », Control, and Prevention of Strangles Corinne R. Sweeney, John F. Timoney, J. Richard Newton, and Melissa T. Hines J Vet Intern Med 2005;19:123–134

(1) Clinique vétérinaire du Parc des Brières

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