Le Syndrome « Piro-Like » en France : premiers résultats du sous-réseau – Bulletin n°35

par Sophie PRADIER (1), Charlène DAIX (2)

Le Syndrome « Piro-Like » (SPL) chez les équidés doit son nom au fait qu’il regroupe un ensemble de signes cliniques non spécifiques pouvant être rencontrés couramment lors de piroplasmoses équines. Depuis 2004, ce terme a émergé dans le cadre d’études et de communications de la commission « Maladies infectieuses » de l’AVEF et est maintenant utilisé fréquemment par les praticiens équins français. Ce syndrome concerne en fait de nombreuses entités pathologiques d’origine inflammatoire, tumorale, parasitaire, mais surtout infectieuse, dont particulièrement trois maladies d’intérêt majeur pour la filière équine : les piroplasmoses (Babesia caballi et Theileria equi), l’anaplasmose équine (ou ehrlichiose granulocytaire, Anaplasma phagocytophilum) et l’anémie infectieuse équine. C’est la surveillance de ces trois maladies que le sous-réseau SPL cible particulièrement. Le manque de connaissances sur les pathogènes du SPL rend le travail du praticien difficile, d’autant plus que les traitements diffèrent en fonction des maladies et ne sont pas sans effet indésirable. C’est pourquoi il est recommandé d’avoir recours à des analyses de laboratoire permettant d’identifier directement ces agents pathogènes, notamment par des techniques PCR, et ceci même en zone enzootique.

Pour être déclaré comme un cas de SPL, l’équidé malade doit présenter de la fièvre (> 38,5°C) aiguë ou chronique, accompagnée ou non d’une anémie clinique (muqueuses pâles) ou biologique (Hb < 9 g/dL) et d’au moins l’un des signes cliniques suivants : anorexie, perte d’état, état d’abattement généralisé, contre-performance, œdèmes ou pétéchies. Cette déclaration se fait en ligne sur le site du RESPE, comme pour les autres sous-réseaux. Les analyses du protocole SPL (prises en charge à 50% par le RESPE) sont une recherche par PCR sur le sang de Babesia caballi, Theileria equi, Anaplasma phagocytophilum (sur tube EDTA = violet) et une analyse sérologique pour recherche de l’AIE (test de Coggins) (sur tube sec = rouge).

Depuis le lancement du sous-réseau SPL en novembre 2013, plus de 100 déclarations ont été enregistrées. Une analyse descriptive des déclarations de novembre 2013 à août 2014 a été conduite. La prévalence des piroplasmoses (au moins l’un des deux agents) est mesurée à 26,6 % sur cet échantillon [IC à 95 % =18,4-34,7], confirmant le caractère enzootique de cette maladie en France. La prévalence en anaplasmose est faible (1,80 % [0-4,3]), ce qui contraste avec d’autres études en France et en Europe. Aucun cas positif d’AIE n’a été détecté dans l’échantillon. Les pathogènes d’intérêt sont plutôt retrouvés dans l’Ouest et surtout le Sud-Est de la France, dans les départements bordant le bassin méditerranéen en particulier (voir cartes). Ces résultats ne sont pas surprenants, d’après ce qui est déjà connu de la répartition de ces maladies.

Une analyse descriptive des variables en lien avec les piroplasmoses a également été menée sur 78 chevaux (69 % des déclarations). Pour B. caballi, aucune variable n’est significativement associée à la positivité pour ce parasite. En revanche pour T. equi, une température rectale maximale entre 38,5 et 40°C du cheval malade est un facteur de risque, alors que la vaccination contre la grippe serait un facteur protecteur, peut-être à mettre en lien avec le fait que les chevaux vaccinés sont plus surveillés par leurs propriétaires et bénéficient plus souvent d’un traitement contre les tiques, par rapport aux chevaux non vaccinés. Ces premiers résultats sont bien sûr à interpréter avec précaution au vu du petit nombre de chevaux étudiés et du peu de recul sur ce sous-réseau.

Le constat du manque d’informations épidémiologiques sur ces maladies en France et cette première analyse des données du sous-réseau SPL démontrent un besoin d’approfondissement des connaissances sur le SPL. La mise en place d’un dispositif de surveillance de ce syndrome répond donc à ce besoin et mérite largement d’être maintenu. La liste des agents impliqués dans ce syndrome est vaste, certains sont très certainement encore inconnus, au vu du pourcentage non négligeable de cas déclarés dont l’origine reste indéterminée. Le développement des tests biologiques et particulièrement des techniques PCR multi-pathogènes devraient être dans l’avenir d’une aide précieuse.

Pour en savoir plus

AMORY H. (2004) Fièvre chez le cheval adulte : approche diagnostique et clinique. Pratique Vétérinaire Équine, 36 (142), 13-6.

MAIR TS, TAYLOR FG, PINSENT PJ (1989). Fever of unknown origin in the horse: a review of 63 cases. Equine Vet J, 21(4), 260-265.

VALON F., DAGUIN I. (2010) Conduite à tenir face à une fièvre aiguë isolée. Nouveau Praticien Vétérinaire Equine 6 (21), 15-25.

Remerciements

Ce travail n’aurait pu être accompli sans l’aide de l’ensemble des vétérinaires sentinelles du RESPE, ainsi que l’équipe du RESPE et du LABEO Frank Duncombe.

(1) ENVT
(2) RESPE