Maladies virales des ânes dans le cadre du RESPE – Bulletin n°39
par Pierre TRITZ (1, 5), Stéphane Pronost (2), Sylvie Lecollinet (3), Agnès Leblond (4, 5)
Les ânes sont souvent les parents pauvres de la médecine équine.
En octobre dernier, le RESPE émettait une alerte suite à la détection d’HVE1 sur un âne stationné en Seine-et-Marne. Le foyer, un parc isolé, comportait quatre ânes et deux chevaux. Les ânes présentaient des troubles respiratoires avec jetage, mais pas de toux, et un peu d’épistaxis.
De nombreuses maladies infectieuses sont communes aux chevaux et aux ânes.
Cependant, les ânes sont connus pour être moins sensibles à certaines maladies comme la peste équine ou l’anémie infectieuse (4).
Les herpèsviroses affectant la sphère respiratoire des ânes se divisent en 2 catégories les herpès virus équins HVE et les herpès virus asiniens HVA.
Les syndromes respiratoires aigus peuvent être causés par les HVE1 et HVE4 chez les chevaux et chez les ânes et par 5 herpèsviroses asiniennes HVA1, 2, 3, 4, et 5, tous isolés chez les ânes (2). Lors d’infection expérimentale chez l’âne adulte avec le virus HVE1 équin, les ânes sont moins sensibles à l’action pathogène de ce virus que les chevaux (3).
Les différents herpès virus se manifestent sous forme de signes respiratoires, neurologiques, d’avortement et d’exanthème coïtal.
Comme chez le cheval, les affections respiratoires peuvent être de moyenne intensité à sévère. Les premiers signes sont habituellement un léger jetage nasal, clair, bilatéral, souvent accompagné d’un jetage oculaire, de fièvre, d’une lymphadénite et parfois de toux (1). Le virus influenza équin peut affecter l’âne et l’infection se traduit par des signes cliniques d’hyperthermie, jetage nasal, toux, dépression et inappétence. Les complications de bronchopneumonies sont fréquentes dans cette espèce (1).
Depuis 2012, seules 17 déclarations RESPE concernent des ânes : 8 dans le sous-réseau « Syndrome Neurologique », 6 dans le sous-réseau « Syndrome Respiratoire Aigu » et 3 dans le sous-réseau « Avortement ». Les déclarations ont eu lieu dans 15 départements différents : Bouches-du-Rhône (2 cas), Calvados, Creuse, Hérault, Ille-et-Vilaine, Landes, Loiret, Moselle, Pas-de-Calais, Pyrénées-Orientales, Seine-et-Marne, Tarn-et-Garonne (2 cas), Vosges, Essonne, Guadeloupe.
Figure 1 : Répartition des déclarations concernant des ânes malades, de 2012 à 2016
L’âge des ânes varie de 1 à 15 ans, l’âge médian étant de 6,5 ans, et l’âge moyen de 6,8 ans.
Dans les cas d’infection respiratoire, les âges varient de 3 à 12 ans, avec une médiane de 7,5 ans et une moyenne de 7ans.
Dans les cas d’affection nerveuse, les âges varient de 1 à 15 ans, avec une médiane à 4,6 ans et un âge moyen de 6,6 ans avec 2 groupes qui se détachent : de 1 à 3 ans et de 11 à 15 ans.
Seuls trois cas unique d’avortement ont été rapportés.
La température corporelle va de 36,7 à 40,3°C, soit une médiane de 38,8°C et une moyenne de 38,5°C. Dans les cas d’infection respiratoire, les températures vont de 37,8°C à 40,3°C, soit une médiane à 39,05°C et une moyenne à 39, 3°C. Dans les cas d’affection nerveuse, les températures vont de 36,7 à 40,3°C, soit une médiane à 38,5°C et une moyenne à 38,1°C.
Un seul âne été vacciné contre HVE1 et 5 contre le tétanos et la grippe sur les 17 animaux déclarés.
Dans le cadre du sous-réseau Syndrome Neurologique, 3 ânes ont fait l’objet d’un prélèvement de liquide cérébro-spinal dont un présentait une inflammation intra-thécale (index Gamma globuline élevé) ; les animaux ont été diagnostiqués avec un bloc auriculo-ventriculaire, un décubitus d’origine inconnu, un tetanos, un décubitus associé à un virus herpès, une encéphalomyélite associée à un virus herpès, une myélopathie d’origine inconnue, une encéphalite d’origine inconnue et un décubitus consécutif à une parasitose.
Des alertes ont été émises par le RESPE concernant les ânes : un avortement à HVE1 dans le Doubs en 2014 (hors réseau), un cas de fièvre de West Nile dans le Dakota du Nord en 2016, 7 foyers d’infection respiratoire à HVE 1, 2 en 2015, 4 en 2014, 1 en 2013 dans le Devon (Royaume-Uni) et un foyer en France en Seine-et-Marne en 2016.
Les virus détectés sont HVE 1 (9 fois), le virus WN, des virus herpès autres (soit des virus Herpès équins ou soit des virus herpès asins) 2 fois, dont une fois dans le liquide cérébrospinal.
Conclusion
Les ânes peuvent être atteints par de nombreuses maladies équines, mais ils sont moins sensibles au virus de la peste équine et au virus herpès équin 1 que les chevaux. Cependant, leur rôle épidémiologique ne doit pas être négligé et ils doivent faire l’objet de déclarations plus nombreuses au sein du RESPE. Les ânes ont la particularité d’être sensibles aux virus herpès asiniens et aux virus herpès équins.
Bibliographie
1. M Crane, Les principales affections et maladies métaboliques chez l’âne. PVE, vol37, N°148 p5-14 ,2005
2. L Nélias & JL Cadoré, Particularités de l’espèce asine illustrées par trois maladies infectieuses, PVE vol 46, N°183, p29-33, 2014
3. AK Gupta & coll, Experimental infection of donkeys with EHV1 of horse origine a study. J equine Sci vol 11, N°2, pp 29-33, 2000
4. Zientara S, Faverjon C, Leblond A, Lecollinet S. 2014. La peste équine : épidémiologie, diagnostic et prévention. Pratique Vétérinaire Equine, numéro spécial Infectiologie, 46 : 142-151
(1) Clinique vétérinaire de Flauquemont
(2) LABÉO Frank Duncombe, BioTARGen Université de Caen Normandie
(3) ANSES, membre du collège Syndrome Neurologique du RESPE
(4) VetAgro Sup – INRA
(5) Co-responsable du collège Syndrome Neurologique du RESPE
Également dans ce bulletin
- Bilan 2016 des sous-réseaux du RESPE
- Paroles de Vétérinaire Sentinelle – Interview du Dr Nicolas Dauphin, Clinique vétérinaire de Bayeux (16/01/17)
- Diarrhée du poulain : un syndrome à ne pas oublier
- Pourquoi suivre les anomalies génétiques ?
- Anomalies de la locomotion : Syndrome neurologique ou pas ?