Rhinopneumonie forme nerveuse : actualités – bulletin n°21
Xavier D’ABLON (1)
De nombreuses épizooties forme nerveuse de rhinopneumonie parfois fatales se sont produites ces deux dernières années aux Etat-Unis, immobilisant tour à tour hôpitaux d’université, centres d’entraînement, hippodromes ou autres centres de compétition équestre. Comme souvent, ces épisodes parfois dramatiques, toujours très contraignants en raison des quarantaines mises en place, ont motivé des recherches et des avancées scientifiques. Tout d’abord, il s’agissait de comprendre pourquoi le même virus EHV1 pouvait être à l’origine de troubles respiratoires bénins ou gynécologiques comme de formes nerveuses fatales. Par une analyse comparative des séquences ADN des virus mis en cause, on a finalement mis en évidence une mutation unique et très fine sur le génome de ces souches. Il existe donc une souche mutante neuropathogène, caractérisée par une très grande capacité de réplication (10 fois plus importante que la souche sauvage) qui explique son plus grand pouvoir pathogène. Cela explique aussi sa plus grande contagiosité.
Un nouveau test diagnostique mis au point aux Etats Unis.
Le nombre de prélèvements reçus au Kentucky’s Livestock Disease Diagnostic Center pour diagnostic d’EHV a triplé en 2006. Ceci est dû aux différents épisodes de maladie qui se sont produits mais aussi au fait que les troubles dus à l’EHV sont entrés de façon plus commune dans le diagnostic différentiel des ataxies ou des syndromes fébriles d’origine inconnue. C’est en effet dans la même université du Kentucky (Gluck Equine Research Center) que le Pr G.Allen a récemment mis au point le diagnostic par PCR en 24 heures (real time PCR) de la souche neuropathogène d’EHV1. Ce test est un test d’urgence, effectué en cas de suspicion d’épisode nerveux, et pratiqué habituellement sur des écouvillons naso pharyngés, mais aussi sur des lavages nasaux, sur le sang total, ou éventuellement des tissus prélevés à la nécropsie. Il est désormais disponible au Laboratoire Départemental Frank Duncombe suite à une collaboration avec le Pr G. Allen.
Le traitement à l’Acyclovir est remis en cause par une étude récente.
L’Acyclovir était préconisé de longue date dans la prévention et le traitement de la phase aiguë de la myélo-encéphalopathie à EHV1. Il a été largement utilisé lors des épisodes des dernières années aux Etats-Unis. Cependant, aucune étude pharmacocinétique n’avait été effectuée chez le cheval. En 2006, une étude a été publiée dans le Journal of Veterinary Internal Medecine, qui a évalué la pharmacocinétique de cette molécule, par voie orale, aux doses de 10 mg/Kg et 20 mg/Kg. L’absorption de l’Acyclovir montre une forte variabilité individuelle et sa biodisponibilité a été évaluée à 2,8%, ce qui ne permet pas d’atteindre une concentration sérique suffisante à l’inhibition des herpes virus. Par ailleurs, la voie I.V. n’est pas dénuée d’effets secondaires et n’est pas recommandée. Quand à la perfusion, il s’agit d’une procédure lourde et onéreuse en pratique.
Plus récemment, on s’est tourné vers une nouvelle molécule, le Valacyclovir (ZELITREX ND en France), qui semble avoir une meilleure absorption digestive. Le Valacyclovir, utilisé à la dose de 22mg/Kg P.O. 2 fois /jour, se serait montré utile dans les dernières épizooties, à la fois dans le traitement curatif (des chevaux en décubitus auraient été capables de se relever) et préventif sur les chevaux fébriles ou exposés. Des études cliniques sont en projet afin de pouvoir proposer des doses et des protocoles de traitement.
En conclusion, si des avancées très significatives ont été faites sur la compréhension et le diagnostic de la myélo-encéphalopathie à EHV1, il n’existe aujourd’hui aucune évidence scientifique sur les méthodes de prévention et de traitement de cette affection, qui peut prendre des aspects très graves, tant par ses conséquences directes (évolution mortelle) que par ses caractéristiques épidémiologiques.
Des plans d’urgence (recommandations en cas de crise) ont cependant été définis avec précision aux Etats-Unis.
Ces recommandations de biosécurité peuvent être consultées sur le site de l’A.A.E.P.:www.aaep.org/pdfs/control_guidelines/Biosecurity_instructions%201.pdf ou sur le site officiel:www.aphis.usda.gov
15% du réservoir biologique d’EHV-1 serait constitué par la souche mutante neuropathogène. G.Allen, d’après les études récentes de son laboratoire, pense que 6% des chevaux américains sont porteurs latents de cette souche. Si l’on considère la grande mobilité des chevaux dans le monde, l’aspect mondialement ubiquitaire du portage latent de ce virus, et l’absence de protection par le vaccin contre la forme nerveuse, la plus grande vigilance s’impose dans les pays européens face à cette maladie.
Références :
– ALLEN G. Demystifying Neurologic Herpes.Equine Disease Quarterly Apr. 2007.
– BENTZ BG et coll. Pharmacokinetic of Aciclovir after a single intravenous ans oral administration to adult horses. J Vet Intern Med 2006; 20: 601-607.
– HENNINGER RW et coll. Outbreak of neurologic disease caused by Equine Herpesvirus-1 at a University Equestrian Center. J Vet Intern Med 2007; 21: 157-165.
(1) Clinique vétérinaire de la Côte Fleurie